Des gènes errants - Clap 37 – Virée

 

Bonjour la Smala-vie-comme au cinéma (clap 37)

Si tu prends la lecture de ces petits textes en cours de route, arrête-toi de suite !.... Tu ne vas rien comprendre ! Il te faut revenir au tout premier texte, celui du 4 septembre 2023, intitulé « Ça part de là »,  et respecter l’ordre chronologique des claps…

Si tu es assidu-e depuis le 4 septembre 2023, tu auras remarqué que, désormais, cette histoire trace son chemin. Alors ensemble, poursuivons-là…

Bonne lecture !


Ludivine est partagée entre la joie d’avoir fait la rencontre de Marc et l’inquiétude pour ce qui arrive à Anna. Elle ferme les yeux et les images d’Anna se tordant comme si elle était possédée, lui collent à la rétine. Et puis tout va très vite, trop vite, tout s’emballe, le temps, les cœurs et les langues aussi. La fête s’arrête, tout le monde se disperse. Mais Ludivine et Marc ne se quittent pas, confondant le temps de l’un et celui de l’autre, leur cœur et leur langue aussi…  

Il est tard, le père va très probablement mal prendre que Ludivine rentre aussi tard. Mais elle s’en fiche de la maison de maître au perron éboulé et au portail rouillé. En tout cas, sur l’instant, elle enfouie tout ça tout au fond d’elle, dans ses entrailles, recouvrant le tout d’un mouchoir de culpabilité, comme d’habitude. Là, au milieu de tout ce qui a surgit, son cœur bat d’inquiétude, d’impatience et de curiosité. Son cœur bat à l’écoute et au rythme du monde ; il se passe des choses sur cette carte du monde-là. Anna va mal mais Marc est là. Le reste peut bien attendre. Alors, Ludivine décide de ne pas rentrer, Ludivine reste avec Marc. Anna, elle, a été transportée à l’hôpital le plus proche.

On ne sait pas ce qu’elle a, Anna. On sait juste qu’à l’hôpital, elle sera entre de bonnes mains. On est rassuré, elle pourra s’apaiser, se détendre, puis retrouver ses esprits. Exactement comme Ludivine avec Marc, Ludivine se sent entre de bonnes mains, elle s’apaise, se détend. Puis, bien plus tard dans la nuit, elle retrouvera ses esprits…

Le lendemain est un jour de travail. Le rideau du magasin n’est pas encore levé, les rayons s’organisent, les sols se nettoient, des clopes se fument en salle de repos. La musique des hauts parleurs résonne plus fort que pendant la journée mais le micro sur pied sur le stand de l’accueil, aujourd’hui n’est pas l’instrument privilégié et réservé d’Anna. Anna n’est pas là. Ils l’ont gardé à l’hôpital. On n’en sait pas plus, tout le monde s’enquière et s’inquiète :

-       Quelqu’un a des nouvelles ?

-       Ben non, pas plus….

-       Qu’est-ce que c’est ce truc qui lui est arrivé ?

-       Moi, ça m’a impressionné…

-       Moi, j’ai jamais vu ça !

-       Ouais, impressionnant… Mais j’crois bien que c’est genre de la spasmophilie, un machin dans la tête…

-       Non, non, ça, ça ressemble à une crise d’épilepsie, ce qu’elle a fait. J’ai vu mon frère une fois faire ça, c’est impressionnant, mais, bon, mon frère, il en a jamais refait après, que je sache…

-       Ah c’est peut-être pas bien grave, alors…

En salle de repos, entre clopes et cafés, chacun y va de sa petite appréciation et interprétation. Mais Anna la chanteuse, Anna la joyeuse, Anna l’amie de tous n’est pas là, l’entrain n’y est pas, encore moins pour Ludivine, seule au milieu de ce brouhaha, sans Anna et loin de Marc. Ce matin, avec sa Ford Escort bleue, il l’a déposée devant le magasin. Ils ont convenu de se retrouver en fin de journée, après le boulot, pour aller voir la maman d’Anna et prendre de ses nouvelles.

La journée en caisse se traîne, Anna manque à Ludivine, leurs discussions, leur connivence, leurs éclats de rire et de joie. Heureusement l’idée de retrouver Marc porte Ludivine, la transporte, faisant fondre culpabilité et crainte enfouies profondément au creux de ses entrailles. La journée se traîne, ennuyante puis finie par passer. Le dernier client, le dernier encaissement, le petit bureau annexe et sombre pour vérifier sa caisse, tout est correcte, elle est libre, elle retrouve Marc à la sortie, le ciel est gris, Marc est là, son cœur s’ouvre mais son esprit s’agite, s’inquiète, vole vers Anna qui n’a pas droit aux visites, ni de ses amis, ni de son fils Madhi. C’est la maman d’Anna qui leur donne de ces mauvaises nouvelles pendant leur conversation et Ludivine ne peut s’empêcher de penser que le pauvre petit Madhi doit être bien malheureux sans son père en prison et sa mère à l’hôpital. En tous cas, Madhi est peut-être malheureux, mais il ne le montre pas. Chez sa grand-mère, il accueille Ludivine avec la spontanéité et la vivacité qui caractérisent son âge.

-       Tu veux bien jouer aux 7 familles avec moi ?

-       Madhi, va jouer dans ta chambre, répond la grand-mère.

Et elle rajoute, scrutant Marc qu’elle ne connait pas :

-       Vous voulez un café ?

-       Marc, il s’appelle Marc. Moi, je veux bien un café, Geneviève, c’est gentil.

-       Oui, pareil, dit Marc

-       Alors, vous avez vu Anna ? Comment elle va ? On peut aller la voir ? Elle est où ?

Geneviève est triste et semble avoir vieillie d’un seul coup en annonçant le peu qu’elle sait. Elle raconte sa visite à l’hôpital, Anna à moitié inconsciente, les médecins dubitatifs et si peu précis. Ludivine tente de la réconforter, mais le cœur n’y est pas.  Elle ne comprend pas et surtout, elle est déçue de ne pas pouvoir rendre visite à son amie et de ne pas avoir d’avantage de nouvelle rassurante. Heureusement, Marc est là, présent et attentif. C’est d’ailleurs lui qui sonne l’heure du départ, Ludivine doit rentrer à la maison de maitre au perron éboulé et au portail rouillé et Marc a un rendez-vous tôt demain matin pour un prochain contrat afin d’animer une soirée musicale.

Il est déjà tard et la nuit est tombée quand Marc dépose Ludivine devant le portail rouillé. La lune est pleine et perce les nuages comme pour montrer le chemin. Ludivine a un pincement au cœur de devoir quitter Marc pour la maison de maître au perron éboulé et au portail grinçant. Une inspiration soudaine lui fait dire :

-       Tu vois, là-haut, à gauche, la fenêtre avec les volets jaunes.

-       Oui, répond Marc

-       Tant qu’elle n’est pas allumée, tu démarres pas.

-       D’accord, mais pourquoi ?... répond Marc inquiet.

-       Comme ça…

Le père est en haut de l’’escalier devant la porte de la maison déjà ouverte en grand. Il a dû entendre la voiture de Marc avant que le portail n’émette son sinistre grincement. Il est debout, le doigt rageur, menaçant, pointé en direction de Ludivine. Ludivine s’approche du bas de l’escalier. Le père ne prononce pas un mot, il reste le bras levé, le doigt dirigé vers la sortie. Ludivine comprend que le père ne veut pas qu’elle rentre dans la maison.

-       Mais Papa… tente-t-elle.

Le père tape du pied et toujours sans prononcer un mot, la main gauche posée sur la hanche, il montre ostensiblement la sortie à Ludivine de son index droit tendu.

Ludivine n’insiste pas d’avantage. Il fait sombre, elle cherche les yeux du père mais ne les perçoit pas. Elle les devine lançant des éclairs de folie. Alors, elle prend peur, transportée deux ans en arrière, se souvenant du courroux du père quand rien ne l’arrête, quand il est contrarié, obtus et bille en tête. Lentement, elle fait demi- tour, passe sous le saule pleureur qu’elle voit frémir sous la lumière crue de la pleine lune qui lui montre le chemin inverse, et c'est en pleurant qu'elle remonte l’allée jusqu’au portail rouillé et grinçant.

Heureusement, Marc est là qui l’attend. Il fume une cigarette dans sa voiture, les yeux rivés sur la fenêtre noire au volet jaune.

 

La suite dans quelques jours ?

 

Sandrine L

Ecrivant


Commentaires

  1. J’adore 🥰 Vivement la prochaine 👍 Catoche 😘

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  2. Pas de suite cette semaine ??? Ludivine est peut-être en vacances ??? Je patiente tranquillement en attendant. Biz Sophie Dup

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