Des gènes errants - Clap 49 - Retrouvailles suite...
Bonjour la Smala-vie-comme au cinéma (clap 49)
Si tu prends la lecture de ces petits
textes en cours de route, arrête-toi de suite !.... Tu ne vas rien
comprendre ! Il te faut revenir au tout premier texte, celui du 4
septembre 2023, intitulé « Ça part de là », et respecter
l’ordre chronologique des claps…
Si tu es assidu-e depuis le 4 septembre
2023, tu auras remarqué que, désormais, cette histoire trace son chemin. Alors
ensemble, poursuivons-là…
Bonne lecture !
Quand Germaine ouvre la porte, pas un
mot, pas un souffle, juste une effusion qui dure longtemps. Et l’étreinte est
tellement serrée que Ludivine ne voit pas qui est là, seulement un
enchevêtrement de bras et deux corps proches qui se serrent à n’en plus finir.
Germaine n’a pas pris le temps de dire d’entrer à l’invité. Ça se fait sur le
pas de la porte, dans le froid du dehors, mais ça n’a pas l’air de gêner qui
que ce soit. Ludivine, de là où elle est, debout près du fauteuil au fond de la
maison, est intriguée, mais par pudeur et discrétion, elle ne s’est pas avancée
d’avantage. Après tout, elle ne connait rien de Germaine. Elle a tout à
découvrir à son sujet. Déjà, elle vient d’apprendre qu’elle a tenté plusieurs
fois de venir les chercher, elle et Réjane, dans la maison de maître au perron
écroulé et au portail fermé. Germaine ne les a donc pas réellement abandonnées…
Ses pensées sont soudain stoppées par un sanglot émis comme un cri et un mot,
un seul mot, celui que Ludivine est elle—même dans l’incapacité de
prononcer :
-
Maman…
Réjane. C’est Réjane qui est là…
Ludivine n’en croit pas ses yeux, ni ses oreilles… Et parce qu’après tout, ça
la concerne aussi, elle s’approche lentement mais discrètement de la porte
grande ouverte. Un des bras enchevêtrés se tend vers elle comme pour vouloir
l’inclure dans l’étreinte. Ludivine s’approche, mais c’est à cet instant précis
que Réjane lâche Germaine, et, sans un regard pour Ludivine, elle lui demande
la voix pleine de sanglots, les larmes coulant abondamment sur ses joues :
-
Mais Maman, pourquoi ? Pourquoi
t’es partie ?
Germaine n’est plus aussi bavarde,
comme à l’arrivée de Ludivine, elle est même silencieuse, émue, soudain aussi
taiseuse que l’était le père dans la maison de maître au perron de pierres
écroulées et au portail clos. Elle tire à elle une chaise de la salle à manger,
incite Réjane à s’y asseoir, ferme la porte au froid du dehors et se pose à
côté, sur une chaise voisine, tout près. Ludivine, seule debout près de la
table se sent dans l’obligation de faire de même, histoire au moins d’être dans
la même position que Germaine et Réjane. Mais, c’est entre Germaine et Réjane
que la conversation s’engage :
-
Ma chérie, j’étais obligée, dit
Germaine, mettant l’accent sur le dernier mot.
Réjane n’a toujours pas eu un regard
pour Ludivine. Elle ne lâche pas Germaine de ses yeux noirs plein de larmes,
comme pour prolonger l’étreinte sur le pas de la porte. Elle lui caresse le
visage, la tête légèrement penchée sur le côté, grimaçante de pleurs. Elle
porte des dreadlocks dans ses cheveux qui retombent jusqu’au bas de son dos,
elle est accoutrée d’une drôle de façon, comme si elle avait superposé tout ce
qui lui était tombé sous la main. Un sombre tatouage dépasse de son col, remontant
le long de son cou vers l’arrière de l’oreille droite. Ludivine ne parvient pas
à identifier ce que ça représente. Elle constate que Réjane n’est plus la
Réjane d’il y a cinq ans, elle est extrêmement amaigrie et parait beaucoup plus
grande que dans son souvenir.
-
Et moi ? Tu m’as laissée ?
Pourquoi ? continue Réjane.
Ludivine est choquée des propos de sa
sœur, l’excluant résolument. Mais elle
ne dit rien. Germaine non plus, vraisemblablement, n’a pas de mot. Elle se
rapproche de Réjane et la prend à nouveau dans ses bras. Réjane s’effondre de
plus belle et c’est un raz de marée qui submerge tout son être. Elle semble en
état de choc. Elle se laisse aller entièrement à son étreinte, comme si elle
était encore un tout petit enfant, se laissant bercer par sa mère. La tension
est insoutenable dans la pièce, chacun dans ses propres sensations. Germaine
console Réjane qui est comme le lait sur le feu. Ludivine ne bouge pas, elle
regarde la pointe de ses pieds, assise à côté de tous ces épanchements qui
semblent ne pas la concerner, alors qu’elle bout aussi à l’intérieur. Tout à
coup, Réjane se lève, regarde autour d’elle et dit tout en séchant ses larmes
d’un revers de sa manche :
-
Alors, c’est là que tu vis ?
Germaine l’interrompt soudain :
-
Tu n’as pas dit bonjour à Ludivine,
Réjane… Tu l’as vu au moins ?
-
Ah, ouais… Salut !
Réjane n’a pas uniquement changé
physiquement, Ludivine ne reconnait plus là, la grande sœur qu’elle adulait,
qui était un modèle pour elle. Elle semble froide, distante, mais apparemment,
ça n’est nullement une impression.
-
Tu m’avais pas dit qu’elle serait là,
elle ?
-
Je voulais te faire la surprise.
-
Ah ça, pour une surprise, c’est une
surprise…
-
Réjane, soit gentille avec ta sœur. On
se retrouve, toutes les trois, après toutes ces années… Faisons que ce moment
soit sympathique, mémorable, agréable…
-
…
- Laisse de côté ta hargne et tes ressentiments, ajoute Germaine.
-
Parce que j’ai pas de raison d’en avoir
de la hargne et du ressentiment ? répond Réjane fixant Germaine de son regard sombre... J’avais presque huit ans quand tu es
partie et après, ça a été le trou noir, moi, je t’ai attendue, je pensais que
tu allais revenir et l’autre, il a jamais rien fait pour qu’on ait de tes
nouvelles.
-
Je le disais à Ludivine avant que tu
arrives. J’ai essayé de venir vous chercher, mais il y avait toujours une bonne
raison pour que je ne puisse pas vous voir. Soit vous n’y étiez pas, soit ça ne
répondait pas… Bref, j’ai cessé, lassée et fatiguée de tout ça. Moi, après
tout, j’étais jeune. D’ailleurs, j’avais l’âge que vous avez maintenant, à peu de
chose près. J’étais amoureuse de votre père, mais tout est allé trop vite pour
moi et quand il a commencé à être ingérable, j’ai pris peur.
-
Ingérable ? ça veut dire quoi,
ingérable ? dit Réjane, sur la défensive.
-
Ben, ça veut dire qu’il est devenu
impulsif, de plus en plus secret, de plus en plus bizarre, je sais pas, moi…
Ludivine observe sa mère et sa sœur échanger ces propos. Elle connait le contenu de chaque réponse, elle reconnait la violence de sa sœur, son aisance à monter la pression et l’ambiance des gens autour d’elle. Elle a la sensation d’une histoire qui se répète. Déjà à l’époque, Réjane était très douée pour faire sortir le père de ses gonds, l’affronter impunément sans penser aux conséquences. Il revient à l’esprit de Ludivine ce fameux soir où sa sœur avait débarqué tard à la maison avec des copains, alors qu’il était interdit d’amener qui que ce soit dans la maison de maitre au perron de pierre et au portail en fer forgé. Elle se souvient comment elle avait poussé le père avec ses questionnements sans fin et qu’au final tout avait valsé de la fenêtre de leur chambre, signant là son départ définitif de la maison. De ce point de vue-là, Réjane n’avait pas changé, et aujourd’hui, elle est plus que jamais dans la provocation, imposant son point de vue, défiant le calme ambiant, passant en quelques secondes aux pleurs apitoyés sur sa mère en hargne à l’encontre du père. Sans parler de l’indifférence vis-à-vis de sa propre sœur, une indifférence affichée qui, au rythme de la conversation, se transforme peu à peu.
Rendez-vous début octobre pour la suite de l'histoire ; en effet, je ne pourrais pas poursuivre, poster, me poser, réfléchir, inventer, m'inspirer, me plonger dans la mer de lettres, de mots, de phrases, puisque sur les deux prochaines semaines, j'ai Bretagne !
Sandrine L
Ecrivant
Profite bien de ces deux semaines de vacances , nous nous saurons patienter . Sofi dup
RépondreSupprimerBonne Bretagne alors !
RépondreSupprimerBonnes vacances Sandrine. Profite bien
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