Des gènes errants - Clap 34 – Anna
Bonjour la Smala-vie-comme au cinéma
(clap 34)
Si tu prends la lecture de ces petits textes en cour de route, arrête-toi de suite !.... Tu ne vas rien comprendre ! Il te faut revenir au tout premier texte, celui du 4 septembre 2023, intitulé « Ca part de là », et respecter l’ordre chronologique des claps…
Si tu es assidu-e depuis le 4 septembre
2023, tu auras remarqué que, désormais, cette histoire trace son chemin. Alors
ensemble, poursuivons-là…
Bonne lecture !
Quand
le rideau du magasin n’est pas encore levé, une vraie petite communauté vit au
rythme des néons qui s’allument, des rayons qui s’organisent, des sols qu’on
nettoie, des clopes qui se fument en salle de repos. La musique des hauts
parleurs résonne plus fort que pendant la journée et le micro sur pied au stand de l’accueil, en plus de servir aux appels, est l’instrument privilégié
et réservé d’Anna. Dès qu’elle arrive, elle se pose sur le tabouret haut et, d’une
voix pleine de puissance et de grâce, elle improvise un mini concert privé a
capella, pour le bonheur de tous les salariés qui se préparent à la journée.
Anna
est une grande brune toute bouclée, les yeux noirs en amande, les lèvres
minces, un éternel sourire largement affiché. Elle n’est pas fière de ses
oreilles qu’elle trouve trop décollées, alors, elle les cache derrière ses lourdes
boucles brunes. Et pour que rien ne bouge, elle a toujours un port de tête en
avance sur son corps, lui faisant un dos légèrement vouté. Il n’y a que quand elle chante assise sur le
tabouret de l’accueil que sa poitrine et ses épaules s’ouvrent amplement,
offrant le son chaud et cristallin de sa voix dans tous les haut-parleurs du
magasin. Anna chante comme une diva. Elle n’est jamais pressée, toujours
tranquille. Elle a cette foulée chaloupée de ceux qui prennent le temps de
vivre et qui savent illuminer le temps des autres rien qu’en étant là. Elle
n’est jamais agacée de quoique ce soit. Anna est de ce type, elle prend la vie
comme elle vient. Et elle la chante divinement bien au micro du magasin, avant
l’accueil des clients. Anna, tout le monde l’aime et Ludivine n’y coupe pas.
Elle lui trouve un charisme fou. Chance, Anna le lui rend bien. Dès qu’elles
sont en service ensemble, Anna veut être près de Ludivine, elle l’a prise sous
son aile dès l’instant où leur regard se sont croisés et où la conversation s’est
engagée :
-
T’es toute jeune, toi, hein ? Tu
sors de l’école ?
-
Ben oui, je viens d’avoir mon bac, en
juin de l’an dernier.
-
Et ? Tu continues pas tes
études ?
-
Ben non, faut que je bosse…
-
Ah, ouais... Fais gaffe de pas faire comme
moi. Ça fait 3 ans que je travaille ici, et puis, j’y suis toujours. Bon, en
même temps, ici, c’est pas la galère, les gens sont sympas, on voit plein de
monde. En plus, moi, je continue des études par correspondance. A la limite, tu
devrais faire ça, toi….
Des
études par correspondance… Ludivine pense à la boite aux lettres de la maison
de maître au perron éboulé et au portail rouillé. Elle imagine de grosses
enveloppes de cours coincées au milieu des prospectus, perdues dans les piles
de papier jaunissant avec le temps qui les a oubliées, des trous dans ses
leçons à apprendre, de l’énergie dépensée à faire le pied de grue devant la
boite aux lettres pour être sûre de tout réceptionner avant que le père n’en
intercepte le contenu. Mais elle répond :
-
Oui, des cours par correspondance, J’y avais
pas pensé. Faut voir…
-
Oui, on se laisse toujours le temps de
voir et puis, hop, le temps passe… Purée, je parle comme une vieille… mais,
pffff…. j’ai que 23 ans, surement pas beaucoup plus que toi, en fait.
Ludivine
rigole de bon cœur avec Anna et quand elle lui avoue ses 18 ans récents, Anna
la prend dans ses bras et lui dit ;
-
T’es trop chou, toi… Chui sûr qu’on va
bien s’entendre.
En
plus d’être une diva, une fille au top, avec un charisme de dingue et de
rallier tous les gens qu’elle connait à sa cause, Anna a des dons de voyance,
parce que, effectivement, Anna et Ludivine deviennent vraiment inséparables.
Elles font en sorte de couvrir leurs heures de service en caisse au même moment,
si possible l’une près de l’autre. Elles prennent leur pause déjeuner ensemble.
En bref, quand on voit l’une au magasin, l’autre n’est jamais bien loin.
-
Eh Ludivine, dit Anna, Tu devrais faire
gaffe à pas trop le fréquenter, ce Jacques…
-
Pourquoi tu m’dis ça ?
-
Ben, je sais pas, un conseil de grande
sœur… Chui pas sûr qu’il soit bien fréquentable malgré son air sympa.
Cette
simple réflexion entraîne un trouble et plein d’interrogations dans l’esprit de
Ludivine. Quand elle y pense… c’est vrai que la dernière fois qu’elle est allée
chez Jacques, en plus de fumer en cercle et d’avoir tous les yeux rouges, elle
avait remarqué de drôle de trucs qui circulaient entre Bruno, Nora, Tess, Ali
et Jacques ; des petites cuillères
pleine de poudre blanche, des seringues, des élastiques . Oh, elle n’est pas dupe, Ludivine. Même Jacques lui a
tout de suite dit qu’il ne fallait pas qu’elle touche à ça, elle. En même
temps, les seringues, beurk, Ludivine en a une peur bleue, alors, bon, c’est
sûr, elle ne s’y aventurera pas… Et puis, quand elle est chez Jacques, bien
sûr, tout le monde est bien sympa, mais ça pue, rien n’est propre, on n’y fait
rien de bien intéressant et à force de boire des bières et fumer des joints,
l’avenir de Ludivine s’embrume sans perspective d’horizon. Surtout que Ludivine
ne boit pas de bière, ne tire que très peu sur les joints qui circulent et
Jacques ne lui propose jamais ce qu’elle espère tout au fond d’elle depuis le
premier jour où leur regard se sont croisés, coucher avec lui.
Anna
a peut-être bien raison, il va falloir qu’elle change ses fréquentations, et qu’elle se tourne vers qui ? Vers Anna, justement, pourquoi pas. En plus
de se fréquenter au boulot, pourquoi ne pas se fréquenter à l’extérieur ?
Anna a certainement plein de choses à lui apprendre, à lui apporter. Avec Anna,
Ludivine retrouve et vibre aux sonorités
de la sororité, et ça a bien l’air d’être réciproque. C’est quand même bien
mieux que de fréquenter des drogués, aussi sympathiques soient-ils.
La suite dans quelques jours ?
Sandrine
L
Ecrivant
Elle comprend vite cette petite Ludivine ... elle ira loin...
RépondreSupprimer