Des gènes errants - Clap 27 – Électrique


Bonjour la Smala-vie-comme au cinéma (clap 27)

Si tu prends la lecture de ces petits textes en cour de route, arrête-toi de suite !.... Tu ne vas rien comprendre ! Il te faut revenir au tout premier texte, celui du 4 septembre 2023, intitulé « Ca part de là »,  et respecter l’ordre chronologique des claps…

Si tu es assidu-e depuis le 4 septembre 2023, tu auras remarqué que cette histoire a désormais pris son autonomie. Alors ensemble, poursuivons-là…

Bonne lecture !

 

« Le soir tombe lentement sur le saule pleureur ; on aperçoit ses branches de la fenêtre de la cuisine, tremblant continuellement au gré des courants d’air. Et puis la soirée s’ouvre, là, devant eux, entre impatience et inquiétude, entre chaleur et foudre. Réjane n’est toujours pas rentrée, le père est de plus en plus furieux, Manie a bien du mal à contenir sa hargne. Ils grondent, bavardent ensemble, parfois, le ton monte entre eux. On n’entend pas Panou qui reste dans le salon accroché à son petit transistor, comme une raison supplémentaire pour ne pas échanger avec son fils. De toute façon,  il n’y a rien à échanger à son sujet, ni avec lui, ni avec Manie. Tant qu’on n’engage pas quelque chose pour le soigner, rien ne changera. Panou ne se sent pas la force d’entacher le lien à Manie quand elle privilégie le lien à son fils, ce faible fils, qui a tant besoin d’elle. Alors Panou se tait.

Ces échanges houleux entre le père et Manie, Ludivine les entend, les vit, les pressent de derrière la porte de leur chambre, en haut de l’escalier. Il y a comme une onde d’électricité qui arrive à elle. Réjane n’est pas là. De cette absence, Ludivine craint le pire et craint le père aussi.

Soudain, du tapage en bas dans la cuisine. On entend des voix qu’on ne connait pas. Ludivine a peur. Il fait nuit. Peut-être que ce sont les gendarmes, Peut-être qu’il est arrivé quelque chose à Réjane ? Son cœur bouscule sa poitrine, elle sort de leur chambre mais reste figée en haut de l’escalier, sur le premier palier. Elle entend la voix de sa sœur, Réjane est là, bien là, mais elle est accompagnée de deux adolescents que Ludivine connait pour les avoir vu à la sortie du lycée. Mais que font-ils là ? Mais qu’est-ce qu’elle a fait, Réjane ? Les consignes sont pourtant claires, jamais personne ne doit être convié à entrer dans la maison ! Oui, Ludivine craint le pire.

Les voix sont confuses et s’agressent entre Réjane, le père et Manie.

-       Et pourquoi j’ai pas le droit d’inviter des amis. Chez mes copines, elles ont le droit, dit Réjane de sa voix grave d'adolescente courroucée.

-        ...

     La réponse reste inaudible malgré que Ludivine tend l’oreille autant qu'elle peut.

-       Ouais, ben, c’est pas normal, répond Réjane.

-      

Ludivine descend quelques marches pour mieux entendre la conversation et se pose sur le deuxième palier.

-       On n’est pas dans une famille normale ici, dit Réjane, provocatrice.

-       Ah oui, c’est sûr, l’herbe est toujours plus verte ailleurs, dit la voix de Manie.

Puis le père, dans une bourrasque de colère, intervient, semblant s’adresser aux deux jeunes étrangers :

-       Vous avez rien à foutre ici, faut dégager, là. Vous êtes pas chez vous, allez, oust, dehors !

Les deux adolescents qui accompagnent Réjane ressortent par la porte de la cuisine, précipitamment, mais Réjane, contre toute attente devant tant de hargne paternelle, continue à alimenter la conversation. Ludivine tremble du haut du palier. Mais pourquoi elle répond, Réjane ? Pourquoi elle ne monte pas tranquillement avec elle dans leur chambre, pourquoi elle lui tient tête au père ? Pourquoi elle sent son corps trembler malgré elle au milieu de cette ambiance électrisée jusque sur ce palier, dans l’angle où elle s’est recroquevillée, témoin impuissant d’une violence ascendante. Ludivine voudrait que tout s’apaise, mais Réjane envenime la situation, même si son attitude se veut conciliante :

-       Mais je comprends pas pourquoi on peut pas inviter nos amis, pourquoi on n’a pas le droit d’aller chez eux, hein ?

-       C’est comme ça, Réjane. Ici c’est comme ça lui répond Manie. Et quand tu seras chez toi, tu feras comme tu voudras.

-       Ben, moi j’en ai marre de tout ça, c’est pas normal et j’ai droit de dire que c’est pas normal.

Du haut du palier, Ludivine perçoit du mouvement, des bruits de chaises qui raclent le carrelage, une gifle qui single, le cri révolté et heurté de Réjane :

-       T’as pas l’droit de nous faire ça ! hurle-t-elle.

La voix de Manie qui, à sa façon, veut calmer la scène :

-       Allez, tu te calmes, Réjane. Ici, tu as un toit, écoute ton père et va dans ta chambre !

Devant le refus affirmé de Réjane et malgré la volonté apaisante de Manie, rien ne se calme, bien au contraire, soudain, tout s’accélère. Tout à coup, Ludivine voit son père monter quatre à quatre les escaliers qui séparent la cuisine où se déroule la scène vers leur chambre. Le voyant fondre sur elle, recroquevillée à l’angle du deuxième palier, elle rentre la tête dans les épaules, se cache les yeux de ses deux mains, persuadée qu’il lui en veut et qu’il va la gifler aussi.

Mais il passe à côté d’elle, laissant derrière lui un courant d’air ambiant et à son passage, tout comme le saule pleureur, les cheveux de Ludivine et tout son corps aussi, tremblent sans pouvoir s’arrêter. »

 

La suite dans quelques jours ?

 

Sandrine L

Ecrivant

Commentaires

  1. Tu me tiens en haleine !!!

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  2. l'électricité est totalement transmise ! Grand écrivain , tu es ! MER

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  3. Catherine A.11/03/2024 10:44

    Je ne lis qu'une semaine sur 2 pour en avoir plus à lire... C'est un peu frustrant le principe du feuilleton :)
    Ces 2 sœurs vivent dans un environnement difficile. Comment vont-elles continuer leur vie ?
    À dans 2 semaines.
    Merci ma jolie. Bises

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