Des gènes errants - Clap 8 - Trésor
Bonjour la Smala-vie-comme-au-cinéma – (Clap 8)
Encre et plume sont mes amis. Je ne m’intéresse même plus à l’évolution du film dans les salles sombres, sur grand écran. Je suis à fond dans mon histoire, ce soit disant synopsis, et je me régale de le modifier à ma sauce « vie nait…grrrr ».
Et toi ? Toujours là ?
Ok, on continue, alors…
« Oui, Ludivine est pétrie de mauvais rêves partis dans les nimbes des quelques nuits passées à l’appartement. Et ça n’est pas la fête. Heureusement, ça ne dure qu’un automne.
Très vite, le champ de conscience de Ludivine retourne dans la
maison de maître au perron de pierre et au portail en fer forgé, chez le père ;
c’est sans compter, ni conter une séparation houleuse et agressive, un
déchirement violent, une bagarre de tous les instants. Ca perdurera entre père
et mère. Personne ne gagnera, personne ne perdra, mais ça durera, et ça leur
appartiendra à tout jamais.
Pour l’heure, Marie-Jeanne et Ludivine, les deux sœurs sont tiraillées,
éclaboussées. Leur père d’un côté, leur mère de l’autre. Elles, au milieu.
C’est une histoire bien triste, mais il en existe comme ça des mille et des cents. Pour autant, leur vie continue dans la maison de maître au perron de pierre et au portail en fer forgé.
La maison est vivante, les portes y claquent et les voix portent. L’inverse aussi… Le terrain autour de la maison est spacieux, chaque coin a sa raison d’être, chaque lieu son ambiance.
En devanture, tout près du portail noir en fer forgé,
quelques arbres fruitiers. Sur le côté droit, un petit potager. Derrière la
maison et plantée au milieu d’une vaste cour, une imposante tonnelle sur
laquelle on peut monter sur son toit plat à l’aide d’une échelle toujours
positionnée. C’est interdit, alors obéissante, Ludivine n’y monte pas. Entre la
tonnelle et la maison, trône un énorme saule pleureur, qui pleure ses branches
sans parvenir à toucher le sol. Et puis, tout autour de cette grande cour, derrière
la tonnelle et sur ses côtés, s’aligne, en un demi-cercle une vingtaine de garages
qu’on loue au mois à des propriétaires de voiture soucieux d’un gardiennage
assuré.
Juxtaposé au grand jardin, à gauche, derrière les garages, il y a un énorme champ, laissé à l’abandon, un champ sans conscience. Nul besoin de sortir de la maison par le portail en fer forgé pour y avoir accès. Il y a un tout petit espace entre le portail en fer forgé et le début de l’enfilade des garages qui laisse libre champ (ça tombe bien) à Ludivine lors de ses moments de jeux dans le jardin. Là, personne ne lui a dit que passer par là, c’est interdit. Alors, obéissante, elle y va.
Ce jour-là, elle franchit l’espace vaillamment, s’assurant
de pouvoir revenir dans la cour, forte de
son expérience de fugue quelques mois plus tôt. Elle n’a pas envie qu’on
la ramène au portail en fer forgé, avec le gros Edgar…
Ce champ laissé à l’abandon l’intrigue et la fascine. C’est
un champ de liberté, mais, une liberté sans risque puisque cette liberté est
tout près de la maison. Les herbes folles poussent là, sans interdit, et au
milieu de ces herbes folles, quelques jolies fleurs aussi se donnent le droit
de résidence. Leurs couleurs attirent l’œil de Ludivine et la transportent de
joie. Il suffit de si peu pour alimenter sa joie... Elle progresse au milieu de
ce champ boueux, magma de terre glaise, d’humidité et de couleurs chatoyantes,
elle est élément dans cet élément. Elle souille ses chaussures mais c’est bien
là le moindre de ses soucis. Un peu plus loin, une ruine, quelques pierres, des
restes d’un lieu anciennement vivant. Les portes y auraient-elles claquées à
l’extrême au point d’en lézarder les murs et les faire tomber en ruines ?
Ludivine arrive tout au bout du champ à l’abandon. Elle se
tourne et aperçoit sa maison de côté, trônant fièrement au milieu des garages
qui la protègent de la vue des curieux, tout petit écrin de verdure au milieu d'un lotissement naissant. Elle s’assoie sur une pile de vieilles
pierres. Son pied se tord soudain sur un quelque chose de dur. C’est un petit livre
à la couverture rigide, sombre, avec des inscriptions en lettres d’or. Elle s’en
empare et l’ouvre, à l’envers. Les pages sont jaunes, parfois déchirées et
surtout il s’en dégage une odeur entêtante de moisi. Il y a beaucoup, beaucoup trop d’inscriptions
qui l’intriguent mais qu’elle ne peut déchiffrer. Elle ne sait pas encore lire.
Et puis, il y a aussi quelques images… Oups, Ludivine met le livre à l’endroit.
Elle se concentre sur ces images qu’elle regarde avec extase. Autour de tous
les visages, se dessinent des rayons comme ceux des soleils sur ses dessins. Et si ce ne sont
pas des rayons, les têtes des personnages ont toujours comme un petit cercle
au-dessus de leur tête, peut-être bien leur chapeau… Mais comment ça tient sans
toucher la tête ? se demande Ludivine. Souvent, les yeux des personnages
sont fermés, rendant leur expression sereine, apaisée, comme Marie-Jeanne quand elle dort. Et puis là, sur cette autre image, une croix plantée dans la terre, un homme qui dort
dessus, les cheveux plein d'épines, des perles sombres au creux des mains qui roulent jusqu’aux poignets.
Il y a des soleils, des orages, des décors gris, parfois lumineux, parfois très
sombres.
Ludivine sent qu’elle a trouvé là un trésor. Elle le sert fort dans ses mains sur le chemin du retour vers la maison. Elle repasse par le petit espace entre le portail en fer forgé et le début de l’enfilade des garages, retrouve son antre protectrice, sa cour, sa tonnelle, son saule pleureur, ses garages, la maison trônant dignement au milieu.
Le soir, au dîner, elle n’est pas parvenue à lâcher son
trésor. Elle le pose sur la table à côté de son assiette.
-
C’est quoi, ça ? dit le père.
-
Ben, j’l’ai trouvé.
-
J’aimerai bien savoir où… Y’a pas d’ça
chez moi !
Il s’empare du livre aux lettres d’or et le met dans la
poubelle.
En plus d’être (toujours) pétrie de mauvais rêves, Ludivine
est pétrie de tristesse et d’incompréhension. »
La suite dans quelques jours ?
Sandrine
L
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